Depuis son enfance, Jean-Marie Élie, juif de naissance, ressent une grande attirance pour la personne du Christ. Pourtant, il se forme à l’école rabbinique et devient juif ultra-orthodoxe… Jusqu’à l’illumination, à la manière de saint Paul, sur une plage de Trouville.
Propos recueillis par Laurence Meurville
Né dans une famille juive non pratiquante, je n’ai jamais entendu parler de Dieu. C’est pendant les vacances d’été, dans une maison de location, qu’a lieu ma première rencontre avec Jésus. J’ai huit ans et, dans la chambre, une croix est accrochée au mur. Je la contemple. Je suis attiré par le Christ. Pourtant, je ne sais même pas qui il est. Chez moi, la nuit, dans le silence que j’aime tant, au pied de mon lit, je fais mon signe de croix, lentement. Toute la journée, j’attends ce rendez-vous d’amour. À l’âge de 12 ans, comme tout garçon juif, je prépare ma barmitsva. Cette découverte de la Torah me passionne mais n’interfère en rien dans mon attirance pour le Christ.
Je me sens enfin chez moi
Un dimanche après-midi, je décide d’aller au Sacré-Coeur de Montmartre. En entrant dans la basilique, je me sens enfin chez moi ! Je prends la résolution de revenir chaque mois. Un jour, soudain, l’orgue se met à jouer. La messe commence. Je reste. À un moment, les gens se lèvent, s’avancent et reçoivent quelque chose des mains du prêtre. Je me sens poussé à me lever aussi pour recevoir cette nourriture. Ayant communié sans le savoir, je me sens rempli d’une grande joie. Les mois passent au cours desquels je communie régulièrement et en juin, comme prévu, je fais ma bar-mitsva. Je reçois de l’argent en cadeau et décide de m’acheter une croix que je porte en cachette. À la messe, j’entends l’Évangile, le livre qui parle de la vie de Jésus. Je m’achète un Nouveau Testament. Dès que j’en ai l’occasion, je me plonge dedans avec avidité. L’Évangile de Jean est mon préféré, je l’apprends par cœur. En cinquième, je suis scolarisé dans une école juive : je découvre le judaïsme, me passionne pour cet univers et commence à pratiquer la Loi juive. À l’école, j’invoque Dieu avec les prières juives. Le soir, seul dans ma chambre, quand je m’agenouille au pied de mon lit et que je fais mon signe de croix, c’est tout autre chose : un rendez-vous avec quelqu’un. Entre 15 et 18 ans, je deviens juif pratiquant. Et à 18 ans, je décide de partir en Israël suivre une formation rabbinique. J’y reste huit ans. Peu à peu, je deviens juif ultra-orthodoxe. De retour en France, je poursuis ma formation et je me marie avec Martine. Nous partons vivre en Israël puis revenons en France. Pendant ces années, nous devenons parents de six enfants.
Le signe de Jean-Marie Lustiger
Alors qu’elle attend notre septième enfant, Martine tombe gravement malade. Elle meurt quelques mois après la naissance. Je deviens père au foyer à plein-temps. Pendant les trois années qui suivent, je prends un peu de distance avec la communauté juive. Je prie à la maison, à mon rythme. Le 6 août 2007, sur la plage de Trouville, mes yeux se posent sur un grand calvaire. Et là, de nouveau, je suis attiré très fortement par le Christ. De grands frissons parcourent mon corps. Je dis à mes enfants sans savoir pourquoi : « Le cardinal Lustiger est en train de mourir à l’hôpital. » J’apprends au retour qu’il vient effectivement de décéder. Quel choc ! Jean-Marie Lustiger, juif converti, m’a fait signe ! Je m’endors sur la décision d’aller voir un prêtre de l’Église catholique, en septembre, quand les enfants seront rentrés en classe. Mais la nuit suivante, je suis réveillé par les mêmes frissons qui m’ont saisi sur la plage et je mets à ressentir fortement la présence du Christ.
Un film me touche
Quelque temps plus tard, je suis devant la télévision avec les enfants en train de zapper et je tombe sur un film retraçant la vie de Karol Wojtyla (le futur Jean- aul II) qui nous touche profondément. C’est à partir de ce moment-là que je commence à retourner à la messe. Après bien des difficultés, je rencontre des chrétiens. Je me prépare au baptême, que je reçois enfin en 2008. Quelques mois plus tôt, j’avais rencontré Pétronille, une catholique. Nous nous marions un an plus tard. Six de mes sept enfants demandent tour à tour le baptême. Et en 2012, ils accueillent avec joie leur petit frère Nathanaël !
Jean-Marie Elie Setbon
De la kippa à la croix
Conversion d’un juif au catholicisme,
Jean-Marie Élie Setbon,
Salvator, 2013