« La miséricorde selon le synode : entrer dans la compassion. »
Le synode l’a annoncé clairement dès le premier jour : « Si le synode ne met pas en discussion la doctrine, il réfléchit sur la pastorale, sur le discernement spirituel nécessaire à l’application de la doctrine face aux problèmes de la famille. La miséricorde n’élimine pas les commandements, elle en est la clef herméneutique. » (2nde congrégation générale).
Cette question est intéressante car, trop souvent, les rapides commentaires semblent opposer dogme et miséricorde ; ou encore pastorale et vérité dogmatique ; alors qu’il n’en est rien… Cette question épineuse est à creuser. Elle ne peut pas être résolue en un coup de baguette magique. J’y reviendrai dans un prochain billet.
Mais être dans la miséricorde, c’est déjà reconnaître que la pastorale familiale est en souffrance. Combien de couples de jeunes ou de moins jeunes vivent avec difficulté leur vie conjugale ? Dès le deuxième jour, le synode s’est attaché à regarder ses souffrances en face et, lors une conférence de presse, le Saint-Siège indiquait que, pour le moment, 90% des interventions étaient en fait un état des lieux graves et sincères. Une importance toute particulière est donc à accorder à la « médecine de la miséricorde ». Mais les pères synodaux ont rapidement mis en lumière que ce l’on appelle « des obstacles pastoraux » ou « des souffrances » sont en fait « des opportunités pour l’évangélisation » ! Autre constat : il nous faut changer nos pastorales pour que les familles puissent faire une vraie rencontre avec Jésus. Trop souvent nos parcours ressemblent plus à des formations trop intellectuelles sans grands effets, alors qu’être dans la compassion et la miséricorde, c’est autre chose. Quelle place ont les familles blessées dans notre Église alors que le monde les excluent ?
Le synode appelle donc clairement à un « changement de paradigme », pour reprendre les mots du cardinal Kasper, c’est-à-dire un changement de manière de voir les choses, de les appréhender, de les toucher. Une manière qui prendrait en compte la souffrance, toujours présente évidemment, dans toutes les situations que le synode abordera. Et c’est précisément cette question de la souffrance qui fait tant défaut dans les divers remontées médiatiques du synode. Parler de miséricorde, c’est se pencher sur la souffrance des personnes avent même de parler de changement de dogme, de façon de faire, de voir, de réfléchir ou même encore de droits à avoir ceci ou cela en Eglise. Nous devons être dans une pastorale « de la tolérance, de la clémence et de l’indulgence ». Et le cardinal Kasper, dont il est bon de voir vraiment ce qu’il dit, avait lui-même interpellé les cardinaux : « Il y a beaucoup de souffrance. Il ne suffit pas de considérer le problème seulement du point de vue et dans la perspective de l’Église comme institution sacramentelle. Nous avons besoin d’un changement de paradigme et nous devons, comme l’a fait le bon samaritain, considérer la situation aussi dans la perspective de quelqu’un qui souffre et demande de l’aide. »
Est-ce que toutes nos approches de ce synode sont empreintes de cette compassion que les pères synodaux ont regardée hier ? Je ne le crois pas. Cette question de la souffrance est encore plus délicate qu’il n’y paraît : comment concilier fidélité et miséricorde, comment se situer entre rigorisme et laxisme ? C’est bien cela qui est en jeu maintenant et c’est bien ce qu’a relaté la 3e congrégation (le 7 octobre) : « C’est la miséricorde qui soigne et accompagne, d’autant que les familles en crise n’attendent pas des solutions pastorales rapides. Elles ne veulent pas être de simples statistiques mais se sentir comprises et aimées. (…) C’est bien d’une conversion pastorale dont il est besoin pour rendre l’annonce évangélique plus efficace. » A nous d’entendre ce cri au milieu d’une certaine agitation médiatique !
Père Cédric BURGUN +
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