Mon mari et moi, nous sommes des “recommençants” dans la foi. Ces années dernières, pour la semaine sainte, nous allions aux offices sans nos enfants, pensant qu’ils étaient trop petits pour comprendre ; nous étions aussi plus tranquilles pour suivre la liturgie. Sans nous en rendre compte, nous avions en quelque sorte enfilé des “pantoufles liturgiques”.
En ce printemps 2020, quelques jours avant la semaine sainte, j’ai réalisé qu’en raison du confinement, il allait falloir agir si nous voulions ne pas passer à côté de ces jours qui sont au cœur de la foi chrétienne ! Avec des amies catholiques, nous avons un groupe WhatsApp où nous nous envoyons des bons plans pour les enfants et nous soutenons au quotidien. Nous avons donc eu des échanges sur la façon de vivre la semaine sainte en famille. Pour elles, les choses semblaient simples : « Mon mari a fait une croix en bois… Si tu veux, pour le repas du Jeudi saint, je peux t’envoyer la recette du pain azyme… »1 Je leur ai dit : « Help ! Les filles, je ne vois même pas de quoi vous parler… » J’étais dépassée. Mes amies m’ont donné des explications et m’ont encouragée : « Il s’agit de se mettre au diapason de Jésus et de vivre cette semaine à sa suite, étape après étape. » Notre communion fraternelle m’a donné la force de me lancer. Nos enfants nous ont aussi fortement motivés : « On pourrait faire le chemin de croix dans l’escalier et se relayer à chaque station pour porter la croix, etc. » Comme s’ils attendaient de vivre ces moments forts avec nous.
Le dimanche des Rameaux, j’ai beaucoup pleuré en entendant mes enfants lire le récit de la Passion de Jésus. Je découvrais la puissance de ces textes et saisissais mieux ce que le Christ avait enduré pour chacun de nous par amour.
Le Jeudi saint, avant le lavement des pieds, nous avons vécu une démarche de pardon, de personne à personne, comme me l’avaient suggéré mes sœurs dans la foi. J’ai proposé à ma fille d’aller demander un vrai pardon à l’un de ses frères avec lequel elle avait eu un conflit, ce qu’elle a fait. Et le temps du lavement des pieds qui a suivi a été étonnamment silencieux. Nos enfants, parfois agités et bruyants, ont senti que c’était un moment important et solennel et ils l’ont vécu avec beaucoup de respect. En même temps, cela a été assez court et simple.
Le Vendredi saint, j’ai vécu le premier chemin de croix de ma vie et le vivre dans ce contexte familial a aussi été très marquant.
Depuis que je peux retourner à la messe, je suis moins dans une attitude de consommation qu’avant, et ma foi est plus ancrée.
Pour m’expliquer l’importance d’être fidèle à la messe, une carmélite m’a donné un jour l’image d’une goutte d’eau qui tombe sur un rocher. Lorsqu’on n’est pas très fidèle, la goutte d’eau tombe un peu n’importe où sur le rocher. À l’inverse, lorsque l’on tente d’être fidèle aux sacrements et à la prière, la goutte d’eau tombe toujours au même endroit. Ainsi, au fil du temps, la roche se creuse et se remplit d’eau. C’est un peu ce que nous venons de vivre. À travers ces offices préparés et vécus ensemble, je crois qu’une grosse goutte est venue creuser et remplir le rocher de notre foi. Cette expérience a marqué notre famille pour toujours. ¨
1. Voir dans la Bible : Exode 12:1-13, id. 13:4 et Deutéronome 16:1.