Je suis né de père agnostique et de mère catholique non pratiquante ; mes parents entraient tout de même dans les églises à l’occasion des mariages, baptêmes, premières communions ou obsèques religieuses. Mon père, lors de son service militaire, s’est même lié d’amitié avec un séminariste, Louis Boisset, devenu prêtre le 12 juin 1965.
Mes parents se sont mariés à l’Église catholique, après que Louis ait assuré le catéchisme à mon père, ma mère souhaitant vivement s’unir à lui devant Dieu ; Louis Boisset a écrit à l’évêque afin de lui demander une dispense de disparité de culte, papa n’étant pas baptisé. L’évêque a accepté, à la condition que mes parents fassent baptiser leurs futurs enfants à l’église catholique et leur apportent une éducation chrétienne. C’est ainsi que ma sœur et moi avons été baptisés par Louis, l’ami prêtre de papa. Ma sœur a fait son catéchisme et devait faire sa première communion… qui n’a pas eu lieu ! Car elle voulait la faire uniquement pour les cadeaux ! Dans ces conditions, mes parents ont décidé qu’elle ne la ferait pas. Quant à moi, maman m’a demandé, alors que j’avais environ huit ans, si je souhaitais faire mon catéchisme avec des religieuses ; mais j’ai refusé, ayant peur de paraître ridicule envers mes camarades de classe ! Pour moi, tout ça, c’était des « bondieuseries » !
Premières angoisses
Le frère de maman était décédé à l’âge de quarante-cinq ans d’un cancer des glandes ; je le voyais régulièrement, branché de partout. Je me suis mis à avoir peur des maladies et de la mort !
A l’âge de six ans, une nuit, je suis à genoux sur mon lit, dans ma chambre qui est juste à côté de celle de mes parents ; j’agrippe de toutes mes forces les couvertures tout en pleurant et hurlant ! J’étouffe ! Je suis terriblement angoissé ! Réveillés, mes parents se lèvent et papa appelle notre médecin qui arrive quelques minutes plus tard ; il diagnostique une crise d’asthme sévère et me fait immédiatement une injection d’un corticoïde très puissant et une autre d’un anxiolytique. Le matin, ma mère me dit que je suis asthmatique, très probablement à vie, et qu’il faudra que je prenne un traitement quotidien et que je fasse des cures.
Une heure environ avant ma crise d’asthme, vers minuit, alors que j’essaie de m’endormir, je me mets à penser à la mort ; et c’est là que je l’associe au néant et à l’infini ; le néant à l’infini ! Et ces deux concepts déclenchent en moi une angoisse paroxystique, car pour moi, le néant, c’est le vide absolu dans le noir, dans les ténèbres, et l’infini est une notion qui me fait également terriblement peur, car on ne peut l’atteindre ni s’en approcher. Terrible ! Le noir absolu à l’infini après la mort ! Voilà la représentation que je me fais d’elle à l’âge de six ans !
« Souffre-douleur de mes camarades »
En cure, mes cheveux longs et ma timidité maladive me rendent vulnérable, et je deviens le souffre-douleur de mes camarades et d’une monitrice sans pitié ; je vis un enfer ! Les conséquences sont immédiates : mes crises d’asthme sont de plus en plus fréquentes et redoublent d’intensité ! Mais le pire, c’est qu’à partir de ce moment, je deviens le souffre- douleur jusqu’à la fin de mes études supérieures, ce qui va m’enfoncer dans une grave dépression. Je vis là mes premières hallucinations auditives, que je considère comme les prémices d’une psychose chronique dans laquelle je bascule insidieusement, et que d’autres évènements de ma vie vont aggraver.
De plus, en parallèle, des amis nous invitent régulièrement chez eux ; un jour, j’ai six ans, ils nous proposent de faire tourner une table en bois : on s’installe tous autour de cette table, et, à la demande de nos amis, nous disons : « Esprit, es-tu là ? » Ce monde des esprits finit par me fasciner, mais je ne mesure pas encore les conséquences désastreuses de ces pratiques diaboliques ! À cette période, je fais un cauchemar : toutes les nuits, alors que j’essaie de m’endormir, je ressens une présence dans ma chambre ; angoissé, je sens une main m’attraper une jambe ou un serpent se glisser sous mon corps allongé puis me mordre ; terrorisé, j’ai envie d’appeler au secours, mais je n’y parviens pas, car je suis tétanisé par la peur ; il faut à chaque fois que je lutte pendant une heure, voire plus, avant de pouvoir bouger ; après une lutte harassante, je me lève, épuisé et tremblotant ; cela a duré jusqu’à l’âge de quarante ans environ.
« Tu devrais te suicider! »
Quant à ma scolarité, elle s’est bien passée jusqu’en CM2 où j’étais toujours parmi les trois premiers de ma classe ; m’étant construit une petite lunette d’observation du ciel à partir d’un pif gadget, mon rêve était de devenir astronome. Dès mon entrée en sixième, je me retrouve dans un lycée de mille cinq cents élèves et me perds constamment dans les immenses couloirs ; je deviens la risée des collégiens, un souffre-douleur, encore une fois ! Je ne m’entends bien qu’avec les lycéens de 1ère et de terminale, avec qui je peux discuter d’astronomie, et parfois des théories d’Einstein qui me passionnent déjà. Mais les collégiens me malmènent, et même me maltraitent, me faisant subir les pires humiliations… La conséquence de toutes ces railleries ne se fait pas attendre : mes bulletins scolaires deviennent catastrophiques… Après avoir redoublé et pris des cours particuliers, et avec l’envie féroce de réussir mes études, je me mets à avoir de bonnes notes, ce qui me permet de passer en 1ère S, avec l’objectif de faire une grande école pour devenir astrophysicien, mon rêve ! Mais je sombre très vite dans la désillusion : toujours victime d’humiliations de la part de mes camarades à cause de mon originalité, de mon côté fantaisiste et débonnaire, je me replie sur moi et souffre de plus en plus de solitude. Je me souviens qu’un jour, pendant un cours d’économie, une fille m’a dit : « Tu devrais te suicider ! » ; à l’instant même, j’ai cru que je devenais fou, et j’ai failli la frapper ! Après avoir redoublé ma 1ère S, j’ai fini par obtenir un baccalauréat A1 (lettres – philosophie – mathématiques), par correspondance.
Enfermé dans les addictions
L’enfer continue à l’école de commerce ainsi qu’à la faculté de psychologie, ce qui aggrave mes angoisses. C’est alors que je sombre dans l’alcool et le cannabis ; l’addiction à l’alcool me vaut plusieurs hospitalisations en psychiatrie. En 2007, lors d’une hospitalisation, j’ai de terribles angoisses et hallucinations, lorsqu’un Portugais catholique qui partage ma chambre se met à prier à voix haute ; je me joins à ses prières, et mes angoisses et hallucinations disparaissent. A ma sortie de l’hôpital, je vais trouver le curé de ma paroisse et décide de préparer ma première communion ainsi que ma confirmation. Je commence à fréquenter assidûment les librairies religieuses et j’éprouve une joie peu ordinaire. Le 16 novembre 2008, je fais ma première communion, et ma confirmation le 23 mai 2010.
Depuis ma conversion, j’ai définitivement arrêté le cannabis.
Depuis ce sacrement de la confirmation, j’ai eu des hauts et des bas, mais, la foi aidant, j’ai définitivement arrêté l’alcool le 26 novembre 2013. Cela fait quatre ans que je suis abstinent. Une belle victoire ! Grâce à Jésus ! Maintenant, je vais bien, grâce à ma foi chrétienne qui s’affermit de jour en jour. Depuis ma première communion, je vais à la messe tous les dimanches, et depuis deux ans environ, j’essaie d’aller à la messe deux à trois fois par semaine. Depuis cinq ans environ, je lis la sainte Bible trois heures par jour, ainsi que des témoignages chrétiens.
Des amitiés indéfectibles
J’ai offert beaucoup de bibles afin de faire découvrir la parole de Dieu à mes connaissances, dont une il y a un an à un de mes meilleurs amis, Dominique ; pendant neuf mois, nous avons lu la bible ensemble tous les jours par téléphone. Cela a fortifié notre foi catholique et a renforcé notre belle amitié. J’ai également deux autres amis qui comptent énormément pour moi, et qui ont toujours été présents dans les moments difficiles : Lucile et Martin. De plus, ils sont chrétiens, et l’on parle très souvent de notre ami Jésus ensemble ; Martin et Lucile me téléphonent tous les jours depuis des années ! Une amitié indéfectible ! J’ai aussi une autre amie fidèle, Élisabeth, qui a 23 ans et habite Paris. Je lui ai offert une Bible. Nos échanges téléphoniques sur la Parole de Dieu et la foi catholique m’apportent beaucoup de joie et de réconfort.
Il y a deux ans environ, j’ai pris la ferme décision de rester célibataire, de façon réfléchie, après en avoir discuté avec Martin et deux prêtres amis, afin de me donner entièrement à Jésus et de disposer de plus de temps pour l’étude de la bible.
Maintenant, je peux témoigner de l’amour infini de Jésus, car sans lui, je ne serais probablement plus de ce monde, car il m’a permis de mettre fin à mes addictions à l’alcool et au cannabis. Oui, Jésus est miséricordieux, et je peux dire aujourd’hui que je suis un chrétien heureux ! Heureux d’aller à la messe ! Heureux de lire la parole de Dieu et de la partager avec mes amis ! Heureux de vivre et de savoir que j’aurai la vie éternelle ! Merci Seigneur !
Pierre BLANC