Mathilde, 22 ans, étudiante, témoigne avec humour de sa conversion en cours dans l’esprit de l’encyclique Laudato Si’. Elle constate que ses nouvelles habitudes adoptées au quotidien dans le souci de prendre soin d’elle-même, de la création et des autres, ont eu des effets y compris dans sa vie spirituelle!
(témoignage extrait d’IEV N° 335, avril-mai-juin 2017).
Depuis quelques mois maintenant, je change peu à peu ma manière de consommer.
Un jour, je suis tombée sur des témoignages de familles « zéro-déchet » ? Hum hum kesako ?…
Une de ces familles peut faire tenir ses déchets non recyclables et non compostables sur un an dans un bocal de 1 litre (Bea Johnson et sa famille). Il faut dire qu’avec nos 500 kg annuels de déchets domestiques par personne nous avons du pain sur la planche pour ravir notre François.
Alors je me suis retroussé les manches et aujourd’hui j’essaye de moins consommer et finalement aussi, de mieux consommer.
J’ai réussi à mettre en place plusieurs pratiques concrètes. C’est vrai, cela nécessite d’entreprendre des changements qui brusquent nos habitudes et conditionnements. Certaines d’entre elles peuvent paraître, au début, pénibles et même très bizarres !… Mais non je vous rassure, je n’ai pas de “poils aux pattes” ou de dreadlocks, je ne porte pas de poncho en laine de yak et je n’ai rien non plus du cliché “écolo-bobo”!
Voici quelques-unes de ces pratiques:
– J’évite tout ce qui a une durée de vie de quelque minutes (voire de quelques secondes) : sac en plastique, gobelets, touillettes, cotons à utilisation unique, lingettes, cotons tiges, essuie-tout, mouchoirs, etc.
– Je fuis les emballages et les leurs suremballages. Pour cela je fais mes courses en vrac. Il existe des magasins un peu partout maintenant et mêmes certains supermarchés ont des rayons vrac. Puis, dans cette même idée, je cuisine un peu plus qu’avant. Oui c’est vrai, il faut prendre un peu le temps, le week-end, pour se faire une tournée pour la semaine par exemple (soupes, gâteaux secs, compotes, yaourts, quiches). Le mot d’ordre ici est de rester simple et de ne pas se lancer dans des recettes compliquées quitte à se décourager.
– Je me suis mise au compost : lombricomposteur en appartement ou petit bout de terrain à la campagne. Certaines communes ont même des composteurs collectifs.
– Je donne au lieu de jeter, puis j’achète tout ce que je peux d’occasion, et/ou plus durable. En effet, certaines matières sont plus solides et réparables : je bannis le plastique et j’opte pour du verre, de l’inox ou du bois. Alors, “finito” le casse-noix en plastique qui ne casse pas les noix, on investit dans un vrai, en inox, qui fonctionne et qui durera toute la vie !
Cela favorise en quelque sorte une consommation plus sociale et solidaire. Je donne certes mais à une association qui, en échange, me propose d’acheter moins cher : un sac en cuir à 7 euros, des tennis à 1 euro, un livre à 50 centimes, ma liste est longue !
– J’ai, évidemment, dû revoir mes priorités en matière de consommation. Ai-je besoin d’acheter ces 6 rouleaux d’essuie-tout, un chiffon micro fibre ne peut-il pas faire l’affaire ? Nop. Ai-besoin de ce bel objet décoratif emballé sous blister ? Nop. Ai-je besoin d’un nouveau manteau ? Nop encore.
Le but n’est cependant pas non plus de se frustrer : radicale mais pas rigide !
– Je tente de diminuer les produits d’hygiène et de nettoyage en utilisant des substances brutes ou en les fabriquant moi-même : dentifrice, shampoing, démêlant, masques, démaquillant, déodorant, baume à lèvre, nettoyant multi-usage, assouplissant, liquide vaisselle, papier toilette (non je rigole !). Pour cela, quelques ingrédients simples : savon de Marseille, savoir noir, bicarbonate, vinaigre blanc, cire et acide citrique. Même pas besoin d’huile de coude et je dois dire que c’est assez valorisant !
– J’ai appris à reconnaître et à trier mes déchets (et oui ce sont les miens). Quand on se penche sur la question, il est facile de se rendre compte que l’on n’y connaîit rien.
– Je supprime mes données en lignes et mails inutiles dont le stockage produit une dépense d’énergie.
– J’ai changé de moteur de recherche sur internet : le nouveau plante des arbres !
Tous ces changements nécessitent évidemment d’être motivé. Certains commenceront par faire du tri, par boire de l’eau du robinet, par arrêter de gaspiller, d’autre choisiront de coller un «stop pub» sur la boîte aux lettres, d’autre simplement, commenceront l’aventure en achetant une gourde et en emportant une tasse au boulot. Il ne faut pas se mettre la pression mais rester éveillé face à la séduction de « confondre bonheur et canapé » selon l’expression du pape François. Et « ce n’est pas parce qu’on ne peut pas tout faire, qu’on ne peut rien faire » (Bénédicte Moret, 5kg pour une famille de quatre).
Malgré ce que l’on peut penser, tout cela ne prend pas plus de temps. C’est une qualité de vie différente et marrante car semées d’embûches et de ratés. J’apprends à dire non à ce dont je n’ai pas besoin, j’essaie d’être libre et non plus noyée dans les mailles d’une injonction d’hyperconsommation.
Je suis contente d’avoir mis tout cela en place, j’apprends à aller à mon rythme et je continue d’avancer.
Je suis heureuse de faire partie d’une Église qui se soucie de l’environnement et de la consommation de ces chers enfants.
Ce qui est beau, c’est de pouvoir partager des idées, ne pas avoir peur de proposer des choses nouvelles, comme nous le montre plusieurs mouvements, nous pouvons changer notre manière de faire en étant ensemble.
Comme le dit si bien Lauren Singer, (1litre en 3 ans) : « Je veux qu’on se rappelle de moi pour ce que j’ai fait sur cette planète, et non pour les déchets que j’ai laissés derrière moi. » Peut-être qu’à la suite du Pape François nous pouvons dire nous aussi « Je veux glorifier le Seigneur en sa création par ce que j’ai fait sur Sa planète, et non pour les déchets que j’ai laissés derrière moi. »
Une petite phrase que je dis en rigolant à mes amis moqueurs : « Ceux qui pensent que c’est impossible sont priés de ne pas déranger ceux qui essaient. »
Les fruits de cette conversion en cours ?
– J’ai retrouvé un regard d’émerveillement et de contemplation envers la création : elle est si riche, si complexe et si belle ! Le meilleur exercice reste l’observation du compost ! Dieu n’a rien laissé au hasard, c’est si parfait !
– Aujourd’hui c’est dur de choisir ce qui ne paraît pas être le plus simple et le plus pratique. Alors il faut faire des efforts, cela m’apprend à me décentrer de moi-même.
– J’ai encore beaucoup de travail, mais je pense que si Dieu m’appelle à m’aimer moi-même et les autres comme il aime, je dois commencer par respecter et aimer l’ensemble de la création et non pas seulement ce qui m’arrange.
– Une autre petite conversion concrète : le fait de devoir aimer ceux qui ne comprennent pas ou qui se moquent. Une fois, je me suis vraiment faite “engueuler” à la boulangerie. On se sent tellement incompris. Mais il faut pardonner et continuer à aimer, même aimer encore plus ! C’est tout simple mais ce n’est pas toujours facile. Dieu me prête la terre, et je veux pouvoir lui dire que j’en prends soin alors, je prends sur moi ! Aussi, dans les magasins où je vais je réapprends à dialoguer avec les commerçants, les artisans ou les bénévoles, mais j’ai encore du chemin ici aussi, j’étais tellement habituée à être juste polie et à prendre mon dû.
Retrouvez le témoignage de Mathilde et de très nombreux autres dans le N° 335 d’Il est vivant! (pour vous le procurer, cliquez sur l’image de couverture ci-dessous).
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