Dieu comble son bien-aimé quand il dort ! Un grand commentateur de Thérèse de Lisieux disait d’elle que son oraison était la rencontre de deux sommeils : celui de Thérèse et celui de Jésus… Tout cela est vrai, mais il y a pourtant des « dodo-rations » coupables.
Qu’est-ce que la « dodo-ration », me direz-vous ? C’est l’attitude plus ou moins consciente (ou souvent qui ne veut pas se dire à elle-même) où pour prier nous prenons une position avachie, paresseuse pour nous tenir devant Dieu. Je me souviens, plus de vingt ans après, du témoignage d’une personne confessant au cours d’un groupe de prière que sa plus grande découverte spirituelle était qu’on ne pouvait être fidèle à son temps de prière si, comme elle le faisait, on priait le soir en pyjama, après avoir pris sa douche, sous sa couette, la lumière éteinte !
Bien sûr Dieu parfois se sert malicieusement de nos dodo-rations pour en tirer profit : ainsi avez-vous peut-être grandi en humilité le jour où, vous réveillant en pleine adoration, vous avez vu votre entourage hilare, et que vous avez compris que votre chant devant Dieu s’apparentait à un doux, profond, et sonore ronflement !
Dans la Bible, l’appel à la prière est toujours un appel dynamique : « veillez…, tenez-vous sur vos gardes… », jusqu’au reproche de Jésus : « vous n’avez pas eu la force de prier une heure avec moi ». Notre corps dit notre attitude volontaire, notre élan. Ainsi Charles de Foucauld, usé par la dure ascèse à laquelle il s’astreignait, ne priait qu’à genoux ou debout, de peur de s’endormir.
A l’inverse, il y a des positions si peu confortables, que bientôt nous ne pensons plus à Dieu mais aux fourmis dans nos jambes ou à la courbature qui nous barre le dos !
Savoir prier avec son corps, dans une attitude tout autant confortable que dynamique, est une clé de la fidélité dans la prière. Lorsqu’on l’a trouvée au début de notre oraison, ne nous hâtons pas d’en changer. Mais si d’aventure nous nous trouvons en plein combat pour nous tenir en présence de Dieu, cherchons avec soin celle qui nous conviendra à cette heure.
(photo: site web du sanctuaire de l’Île Bouchard)
Père Hervé Guillez
Le père Hervé Guillez est curé de la paroisse Saint-Joseph-Artisan à Paris (10e).